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Paul Gavarni (1804-1866)

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Illustration de Gavarni
Gravure d’après une lithographie de Paul Gavarni

Par Henri Beraldi

GAVARNI (Guillaume-Sulpice CHEVALLIER ; qui signa d’abord Hippolyte Chevalier). — Une simple notice est bien insuffisante pour le peintre de mœurs du XIXe siècle. Il faut un volume pour analyser son œuvre immense, un autre pour le décrire. Mais ces volumes existent, et nous n’avons pas à les refaire. Quiconque veut connaître l’homme par des détails intimes, doit lire le Gavarni de MM. de Goncourt, biographie d’autant plus curieuse que, liés d’amitié avec lui, ils en ont obtenu communication des notes dans lesquelles il consignait sa vie au jour le jour (1) ; quiconque veut collectionner l’œuvre doit posséder le catalogue de MM. Mahérault et Bocher. Nous nous bornons ici à donner les renseignements biographiques indispensables, à signaler les trois phases du talent de Gavarni. L’œuvre de Gavarni ! un monde !… dont il nous faut faire le tour en quatre-vingts minutes.

Gavarni s’est révélé relativement tard, passé trente ans. Jusque-là, sa vie n’offre rien de très particulier qui fasse deviner ce qu’il sera. Il est Parisien, né le 13 janvier 1804, rue des Vieilles-Haudriettes, de Sulpice Chevallier, né en 1745, et de Marie-Monique Thiémet, née en 1770 et soeur de Guillaume Thiémet, peintre, artiste dramatique et joyeux mystificateur, qui fut son parrain. Il commence à travailler, tout enfant, chez un architecte, puis chez un fabricant d’instruments de précision, fait en 1818 des mathématiques dans l’institution Butet rue de Clichy, et entre ensuite à l’école du Conservatoire pour apprendre le dessin des machines. De cette éducation, il lui restera toujours le goût des mathématiques et des spéculations de théorie pure sur des sujets scientifiques, goût qui, sur la fin de sa vie, tournera chez lui à l’obsession.

A vingt ans, pour se procurer quelque argent, il commence à dessiner de petites lithographies pour Mlle Naudet et pour Blaisot, notamment cet album de Récréations diabolicofantasmagoriques, étrennes de 1825, dont il n’existe plus aujourd’hui peut-être que l’exemplaire de la Bibliothèque nationale. Il entre, chez le graveur Adam qui, en 1824, lui propose d’aller graver le pont de Bordeaux. Le jeune homme accepte la mission et les douze cents francs d’appointements, part pour Bordeaux, ne peut se plier au travail du bureau, donne sa démission en 1825 et, avec une imprévoyance d’enfant, se lance dans un voyage de touriste, le bâton à la main, ayant pour tout bagage quelques dessins, un peu de linge, une pipe et des crayons : avec quoi l’on ne va pas loin. Il arrive à Tarbes dans un complet dénuement et se trouve bientôt dans la situation la plus précaire ; mais il est accueilli par M. Leleu, géomètre en chef du cadastre, qui lui procure, sous couleur d’une occupation dans son service, le logement et la table, l’existence assurée et tranquille, d’agréables relations et l’occasion de dessiner des paysages, d’écrire ses impressions, d’excursionner et d’ascensionner dans les Pyrénées. Ainsi s’explique comment une liste complète de son œuvre doit mentionner un Plan d’alignement de Lourdes, et aussi comment Chevallier, frappé de la beauté du cirque de Gavarnie, se souvint de ce nom quand il lui fallut trouver pour lui-même le joli nom de guerre qu’il a rendu si célèbre.

Un détail en passant : ce fut le vieux La Mésangère, l’éditeur du Journal des Dames, qui remarqua le premier les lithographies du jeune Chevallier… Il lui fit commander, par l’intermédiaire de Blaisot, une série de costumes pyrénéens.