media='all' />

Les deux ennemis se regardèrent…

Accueil » Tirés à part » Un beau-père » Les deux ennemis se regardèrent… Modifier

Un homme à cheval rencontre un homme en fiacre
Les deux ennemis se regardèrent en silence. Chacun d’eux semblait attendre la provocation de l’autre. Pendant un instant, à voir la sourde rage répandue sur la physionomie de Broussel, on eût pu croire que de ses lèvres blêmes et contractées allait jaillir une mortelle insulte. Il n’en fut rien pourtant. Après une lutte intérieure, violente, mais courte, le beau-père de Laure parvint à comprimer sa fureur ; bientôt il sourit orgueilleusement en homme qui, ayant su triompher de lui-même, se croit le droit de compter pour rien tout autre ennemi, et, se retirant par un mouvement lent et calme, il s’appuya d’un air dédaigneux dans un des angles de la citadine.
Cette pantomime méprisante irrita Laubespin plus que ne l’eût fait peut-être un outrage direct, et lui ôta le sang-froid qu’il s’était promis de conserver.
— Monsieur, un seul mot, dit-il d’un ton animé en faisant approcher son cheval de la portière.
— Je vous écoute, monsieur, répondit négligemment Broussel sans changer d’attitude.
— Cette rencontre devant la maison où je demeure me donne à penser que peut-être aviez-vous l’intention de me rendre visite.
— Vous m’apprenez que vous demeurez dans cette maison ; jusqu’à présent je l’ignorais.
— Cependant votre manière de stationner devant cette porte semble indiquer…
— Que j’attends quelqu’un, c’est possible ; mais ce quelqu’un, ce n’est pas vous.
 
Extrait de Un beau-père, de C. de Bernard, publié dans Les Bons Romans, 1862.

Tags : , , , ,